Les frais d’intervention ou de forçage doivent être inclus dans le calcul du taux effectif global. La Chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu le 5 février 2008 un arrêt très intéressant à ce sujet qui porte sur la prise en compte des frais de forçage dans le calcul du Taux effectif global (TEG) (N° de pourvoi 06-20783).
Quels sont les faits ?
Une banque accorde à un client une autorisation de découvert. Ce client dépasse régulièrement le découvert autorisé et les opérations effectuées au-delà de ce découvert font l’objet de frais bancaires également appelés « frais de forçage », frais d’intervention ou frais de dépassement.
La Banque ne pouvant obtenir la régularisation du solde débiteur assigne son client en paiement.
La position de la Cour de Cassation
Le client, en défense, demande la condamnation de la banque au remboursement des frais d’intervention (frais de forçage) considérant qu’ils n’étaient pas dus. Subsidiairement, si ces frais étaient effectivement dus, le client demande à ce que ces frais soient inclus dans le TEG.
La question posée aux juges était de savoir si les frais de forçage qui sont présentés comme des frais comptables devaient être inclus dans le calcul du taux effectif global. La Cour d’appel de Rennes, le 8 septembre 2006, considère que non. Ces frais ne doivent pas être inclus, car ils rémunèrent un service spécifique : le passage d’une opération comptable et du paiement en dépit du dépassement du seuil autorisé.
Pour la Cour d’appel, ces frais ne sont donc pas des compléments d’intérêts déguisés et sont distincts de l’opération de crédit que constitue le découvert.
La Cour de cassation, sur le pourvoi formé par le Client, juge au contraire que « la rémunération d’une telle prestation n’est pas indépendante de l’opération de crédit complémentaire résultant de l’enregistrement comptable d’une transaction excédant le découvert autorisé ».
Pour la Cour de cassation, il existe donc une distinction entre deux opérations de crédit. Il existe une opération résultant de l’autorisation de découvert et une autre opération de crédit résultant du dépassement de l’autorisation. En acceptant d’honorer un paiement qui dépasse l’autorisation de découvert, la banque accepterait de facto un nouveau crédit. Or les frais de forçage sont directement liés à cette nouvelle opération.
Ils doivent donc être inclus dans le calcul du TEG au même titre que les frais bancaires prélevés de manière habituelle lors de la conclusion d’un prêt et ce taux doit être communiqué par écrit au client.
Les textes de loi
Article L 313-1 code de la consommation
Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.
Toutefois, pour l’application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d’officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
En outre, pour les prêts qui font l’objet d’un amortissement échelonné, le taux effectif global doit être calculé en tenant compte des modalités de l’amortissement de la créance.
Un décret en Conseil d’Etat déterminera les conditions d’application du présent article.
Article 1907 du Code civil
L’intérêt est légal ou conventionnel. L’intérêt légal est fixé par la loi. L’intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas.
Le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit.
Comment se faire rembourser les commissions d’intervention ?
Si vous voulez demander le remboursement des commissions d’intervention, nous vous déconseillons de le faire seul si le montant est important.
Si les sommes en jeu sont importantes (au moins 1 000 €) Banque-info vous conseille de contacter un avocat qui pourra vous aider dans vos démarches ; vous devez toutefois savoir, au prélable, qu’actuellement les banques utilisent tous les recours judiciaires (appel, cassation) pour décourager les clients de saisir la justice et qu’un recours à la médiation a peu de chance d’aboutir. La procédure peut donc être longue et génératrice de frais, sans assurance de succès.
Si le montant des commissions est inférieur à 1 000 €, nous vous conseillons de faire une demande de remise partielle gracieuse auprès de votre agence en vous aidant du modèle de lettre proposée par banque-info.
Comment éviter les commissions d’intervention ?
Pour éviter ces frais, il y a aussi des mesures préventives à prendre :
La loi bancaire adoptée le 17 juillet 2013 prévoit un double plafonnement des frais bancaires en cas de dysfonctionnement du compte (découvert) : ces mesures seront applicables dès parution du décret d’application.
Le « décret 2013-931 du 17 octobre 2013 relatif à ce plafonnement des commissions d’intervention » a été publié au Journal officiel.
Le décret plafonne les commissions d’intervention à compter du 1er janvier 2014. Les « commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire » ne devront pas dépasser 8 euros par opération et 80 euros par mois, et pour les plus fragiles 4 euros par opération et 20 euros par mois.
Un décret publié le 1er juillet 2014 au Journal officiel vient de définir la clientèle qualifiée de « fragile ».
Sont considérés comme fragiles les clients en surendettement et ceux inscrits pendant trois mois au fichier de la Banque de France suite à un chèque impayé ou à un retrait de carte bancaire. Le décret laisse aussi de la latitude aux banques puisqu’un client peut être considéré comme fragile si son compte cumule plusieurs incidents de fonctionnement pendant trois mois ou si ses ressources sont jugées limitées.
Le décret prévoit par ailleurs que les clients fragiles puissent bénéficier d’une offre bancaire spécifique à bas coût sur proposition de la banque ; cette offre doit contenir : un compte de dépôt, une carte à autorisation systématique, quatre virements Sepa par mois, deux chèques de banques par mois, un système d’alertes, un moyen de consultation du compte à distance, la fourniture de RIB, un changement d’adresse par an et bien entendu le plafonnement spécifique des frais en cas d’incident de paiement. Le décret précise enfin que cette offre ne peut être facturée plus de 3 euros par mois. Un prix qui pourra être revu à la hausse chaque année dans la limite de l’inflation.
- Si vous avez besoin d’un découvert, demandez à votre banque une autorisation de découvert ; les banques accordent, en général, assez facilement des découverts pour un montant égal à la moitié des revenus mensuels.
- Si vous pensez que votre compte va dépasser le montant autorisé, prenez préalablement contact avec votre conseiller pour trouver une solution (ne le mettez pas devant le fait accompli).
- Pour éviter la multiplication des frais de forçage, il faut éviter les petits paiements par carte ou par chèque qui peuvent coûteux très chers en frais (jusqu’à 8 € par opération non autorisée).
- Si vous pensez que vous allez être à découvert pour une période plus longue que ne le prévoit votre convention de compte (en général, 15 jours par mois), demandez plutôt un crédit sous forme d’une réserve d’argent adossée à votre compte-chèques qui vous évitera d’être en dépassement par découvert non autorisé, car le système informatique qui gère ce type de réserve déclenche un virement automatique de la réserve vers le compte chèques (dans la limite du montant restant disponible), dès lors que le montant du découvert autorisé est dépassé ou que le compte chèques présente un solde débiteur pour une durée plus longue que la durée autorisée. Ce système permet ainsi d’éviter les frais liés au dépassement ponctuel du découvert attaché au compte chèques.
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Le plafonnement des commissions d’intervention